Souvenir d'enfance

Le soleil est à peine apparu au-dessus des montagnes de l’est que j’ouvre déjà les yeux, impatient de commencer cette nouvelle journée. Couché dans mon hamac qui me sert de lit, comme tous les autres membres de ma famille, je me redresse pour guetter le réveil de mon frère et de mes sœurs. Ceux-ci dorment toujours paisiblement, visiblement peu préoccupé par le soleil qui empli petit à petit leur perchoir de lumière. Oh aller, du nerf. J’ai envie de bouger moi. Irrité, je me redresse complètement pour tenter de me lever et mon hamac commence déjà à s’agiter sous moi. Le craquement des planches de bois sur lequel il est attaché commence à se faire entendre et l’une de mes sœurs pousse alors un grognement avant de se retourner, apparemment tout juste aux portes du sommeil. Si je continue de m’agiter ainsi, ils se réveilleront forcément. Un sourire malicieux au visage, je n’hésite donc pas à m’avancer sur le bord de mon lit de fortune pour me laisser tomber sur le dos et l’impact de mes pattes sur le sol de bois termine le travail. Mon nom ne tarde pas à être prononcé par tout monde.

- Aaaah, Huzo !
- Pourquoi est-ce que tu nous as réveillé ?
- Retourne dormir, il est trop tôt.

Une chance que c’est moi le plus vieux de toute la fratrie... pourquoi est-ce que je n’ai pas le droit de choisir ce que nous allons faire ? C’est toujours les plus jeunes qui décide et ça m’irrite au plus haut point. Voyant que mon plan n’a pas fonctionné, je croise mes petites ailes contre mon torse avant de taper du pied.

- Levez-vous, le soleil est là, dis-je en montrant l’astre lumineux de mes ailes, bien que personne ne me regarde. Papa sera furieux s’il vous voit dormir encore à cette heure-ci.

De nouveau grognement me réponde, mais aucun d’entre eux n’a la force de sortir de son hamac. Bah, c’est leur problème de toute façon. Au moins, il sera fier de moi. Fâché, je grimace avant de sortir de notre volière qui est liée au reste du pont en bois qui contourne le pic rocheux sur lequel mon peuple s’est établi bien des années auparavant. Comme nous sommes six, nous dormons à l’écart de mes parents qui dorment dans la volière juste à côté, contrairement à bien des familles moins nombreuses qui restent tous ensemble. Impatient de rejoindre les adultes, je m’avance d’un bon pas sur le pont pour entrer dans la structure voisine et comme je m’y attendais, mes parents sont déjà debout. Encore embrouillés par le sommeil, mais debout. Le petit déjeuner qui cuit sur le feu au centre de la volière dégage déjà une merveilleuse odeur et ma mère s’approche rapidement pour me faire un câlin, fidèle à ses habitudes. Un peu plus loin, assis en tailleur près du repas qui cuit, mon père nous observe en silence.

Finalement, je suis heureux d’être le seul à m’être levé puisque cela me permet d’obtenir toute l’attention que je veux. En temps normal, mes petites sœurs accaparent constamment mes parents à longueur de journée à cause de leur hyperactivité et il est très rare que la situation soit inversée. J’aimerai que cet instant puisse durer éternellement.

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Action : Récolter dans la nature

Je ne m’étais pas trompé sur mon père. Bien qu’il ne soit pas aussi affectueux que ma mère, il est visiblement très fier de voir son fils ainé déjà debout et prêt à débuter la journée du bon pied. Le soleil continue de grimper sur le ciel sans nuage et une brise de tarde pas à se faire sentir, ébouriffant légèrement son plumage foncé au passage. Serait-ce le moment idéal pour apprendre à voler aux enfants ? Un coup d’œil vers la chaine d’Hébra qui s’étend au nord le fait hésiter un moment et il préfère reporter sa décision à plus tard. De mon côté, ma mère finit par mettre fin au câlin afin de pouvoir continuer à cuisiner et je l’observe d’un œil attentif après m’être approché de mon père pour m’asseoir en tailleur à ses côtés. Je crois bien que c’est la première fois que je suis debout aussi tôt et ce n’est pas plus mal, ça me permet d’apprécier l’absence de mes soeurs.

- Mon fils semble être en pleine forme aujourd’hui, déclare l’adulte en bombant le torse. Est-ce que tu te sens prêt à prendre ton envol ?
- Quoi ? Aujourd’hui ?

L’oiseau noir ne fait que hocher la tête pour confirmer ses paroles et si mes craintes sont nettement perceptibles sur mon visage, c’est aussi le cas de ma mère qui redresse vivement la tête. Toute trace de sommeil semble avoir disparu de sur son visage en seulement quelques secondes.

- Tu penses vraiment que c’est le bon moment ? demande-t-elle, hésitante. Je veux dire... il ne vaut pas mieux attendre de voir comment évoluera la journée ? Et si une tempête se déclarait ?

Il est vrai que la région est parfois touchée par une tempête de neige qui provient des montagnes du nord et qui dévie vers le sud à cause des vents, mais cette journée s’annonce être parfaite. Je ne sais pas trop ce que mon père va faire et bien que j’ai hâte d’apprendre à voler, je suis aussi très nerveux à cette idée. J’aime observer les plus âgés gagner les cieux depuis la plateforme d’envol, mais la plupart des jeunes de mon âge en sont encore incapable. Nos ailes sont trop petites et ne parviennent pas à supporter notre poids en général, alors j’ignore si je suis prêt ou non à relever ce défi. Je vais devoir essayer tôt ou tard, car si je ne vole pas, je ne peux pas me considérer comme un vrai oiseau. Je ne ferais pas partit de la famille, ni même du village et je ne peux imaginer mon avenir ainsi. Des histoires racontent qu’on bannissait ceux étant incapable de voler, mais je ne suis jamais parvenu à connaître la vérité à ce sujet. Comme si les villageois avaient peur d’admettre leurs erreurs du passé.

Un silence pesant s’installe alors dans la volière tandis que mes parents se dévisagent du regard. Le vent continue de souffler doucement et je continue de contempler le déjeuner qui bouillonne de plus en plus fort sur le feu. J’ai tellement fait que je pourrais manger presque manger un Moblin entier.

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Action : Récolter dans la nature